Depuis les années 70, les kilims sont apparus sur le marché et continuent, parmi les tapis anciens, de remporter tous les suffrages des décorateurs et amateurs de belles pièces.
© Galerie Triff, Paris.
L’origine des kilims se trouve en Anatolie où les premières traces figurent sur des fresques rupestres datant de 5000 ans avt. J-C. De la Turquie, le kilim a progressivement rayonné dans le Proche et le Moyen Orient puis vers l’Europe de l’Est. Le kilim – tissage – (en turc) se différencie des tapis traditionnels à points noués, par sa technique de réalisation et son esthétisme très spécifique.
Orgueil d’une famille, travail exclusif des femmes sédentaires ou nomades, symbole d’une tradition, ce tapis n’était pas destiné au marchandage mais appartenait au trousseau de la future mariée. De ce fait, il a conservé toute son authenticité, nullement dénaturé par des exigences de mode. Les kilims restent l’expression d’une création artistique personnelle. Chaque tribu, chaque village possède son propre style, couleurs chatoyantes ou sobres, décors complexes ou épurés selon les régions. Qu’ils aient une fonction sociale ou religieuse, un grand soin était apporté à leur fabrication. Les plus belles pièces étaient déployées lors de la visite d’hôtes de marque ou offerts à la mosquée ; d’autres recouvraient le sol, les murs, servaient de paravents, emballaient les colis fragiles…
Chaque tribu, chaque village possède son propre style, couleurs chatoyantes ou sobres, décors complexes ou épurés
« Ce qui détermine leur région de provenance et leur datation, explique Eric Daumas (Galerie Triff), c’est avant tout le style du dessin. Ce n’est pas un motif particulier, mais un ensemble graphique, porteur d’influences régionales fortes. Ce qui différencie les kilims anciens des kilims de collection, c’est le type de colorant utilisé pour teindre les laines ». La bordure constitue un élément de première importance, puisqu’elle signe le tapis, mais il y a parfois des exceptions à la règle. La couleur joue aussi un rôle primordial : les bleus et les rouges vifs sont très représentatifs du Caucase, les kilims anatoliens sont davantage colorés de jaune et d’orangé.
Classification des kilims
Kilims anciens ou de collection
Généralement antérieurs à la fin du XIXe siècle, ils sont tissés 100% laine et les couleurs proviennent d’une teinture végétale. Le bleu indigo est très présent sur les pièces anciennes. Les couleurs végétales se caractérisent par leur densité et leur éclat resté intact. La notion d’ancienneté n’est pas celle du temps écoulé ; elle correspond à l’arrivée dans telle ou telle région, de l’emploi de la teinture chimique, avec un décalage évident. Dès l’apparition des colorants chimiques, les femmes ont été séduites par la palette de couleurs vives et variées qu’offrait ce nouveau procédé et ont peu à peu abandonné l’usage des colorants végétaux. Dans certaines régions, ce mouvement s’est amorcé dès la fin du XIXe siècle.
« Ce qui différencie les kilims anciens des kilims de collection, c’est le type de colorants utilisé pour teindre les laines »
Kilims semi-anciens
Ces pièces ont entre 30 et 80 ans et présentent un tout autre aspect. Contrairement aux couleurs végétales, la fraîcheur des teintes a disparu, elles sont plus fondues mais non dénuées de charme et s’intègrent parfaitement dans la plupart des intérieurs. Au lavage, les colorants chimiques de mauvaise qualité peuvent déteindre, ce qui n’est pas le cas pour les pièces anciennes. Rentre en compte ainsi, la stabilité de la couleur, la qualité de la teinture et son travail, plus ou moins bien maîtrisé par les femmes.
Le tissage s’effectue à 80% avec de la laine de mouton (dans l’Est de la Turquie, des fils de soie ou d’argent sont insérés) sur des métiers haute lice (verticaux) ou basse lice (posés à plat sur le sol). Le tissage peut se faire par bandes et par morceaux. « La grande difficulté et la valeur du kilim tient à cette maîtrise de la technique de raccord entre ces différents éléments » précise Eric Daumas.
Kilims contemporains
La Galerie Triff, incontournable par ses expositions qui ont remis le kilim à l’honneur, a développé ses propres collections depuis les années 80. Les tapis sont réalisés entièrement à la main, avec les plus belles qualités de laine et de colorants. Cela permet de reproduire des motifs traditionnels mais aussi une large gamme de modèles contemporains. Tous sont réalisés par des femmes dans les villages d’Anatolie, ce qui permet de maintenir une activité économique primordiale dans le tissu rural turc.
Valeur
Elle tient à la rareté de la pièce. La dimension importe également ; les 2,60 m/1,60 m sont devenus rares et recherchés. Equilibre des couleurs, qualité d’exécution des bordures, des découpages et assemblages des pièces sont essentiels.
Conseils de pro !
Avant tout achat, faites ouvrir le tapis et examinez les imperfections, la tension de la chaîne (les « vagues » sont irrécupérables), les points d’arrêt afin qu’ils ne cassent pas.
Budget
Pour un kilim ancien ou de collection, XIXe siècle, à partir de 1.500 €.
Pour une pièce semi-ancienne de grande dimension (3mx 1,60m/1,80 m), comptez entre 1000 et 1.800 € selon l’ancienneté du tapis.
Pour un kilim contemporain, le prix se calcule au m2 selon la qualité de la laine (filée main) et des colorants, ce qui permet d’obtenir des nuances de couleurs et des effets de matière surprenants. Entre 350 et 400 € le m2.
Propos recueillis auprès de la Galerie Triff (M. Daumas)
13, bd Raspail, 75007 Paris.
www.triff.com