- Musique

Entretien avec Elliott Murphy

Marie Torres - 3 mars 2022
Près de 50 ans après la sortie de son premier album « Aquashow », Elliott Murphy, auteur-compositeur-interprète, est toujours bien présent dans l'univers de la musique mais aussi de la littérature : « Live in Bilbao » et « Tinnitus Journals » en témoignent.

Micmag.net : Votre dernier album est un « live » enregistré à Bilbao...

E.M. : Chaque année, en janvier, nous jouons à Bilbao, et ce depuis 25 ans. 2021 a été malheureusement la première année où nous n'avons pas pu jouer à cause de la pandémie de Covid. Le concert enregistré sur le CD « Live in Bilbao » date de 2015. Une soirée particulièrement bonne musicalement pour Olivier (Durand) et moi pour de nombreuses raisons. Tout d’abord, le spectacle était complet des semaines à l’avance, il y avait donc une énergie énorme et une excitation dans le public que nous pouvions ressentir lorsque nous montions sur scène. De plus, nous savions qu'il était filmé car des extraits devaient être inclus dans le documentaire « The Second Act of Elliott Murphy », nous étions donc très concentrés parce que nous savions que tout ce que nous ferions serait à jamais gravé. Et, je pense que le choix des chansons était particulièrement bon : à la fois des classiques et des nouvelles de « Intime l’EP » que je venais de sortir. Mais surtout, certaines nuits sont magiques pour des raisons inexplicables et c’était l'une d’entre elles.

M.: … il y a une grande complicité entre Olivier Durand et vous

E.M.: Olivier Durand est mon guitariste et partenaire musical depuis plus de 25 ans maintenant. Nous avons joué plus de mille concerts ensemble et écrit des dizaines de chansons. Je pense donc que nous en sommes arrivés au point où nous pouvons lire dans les pensées des autres lorsque nous sommes sur scène ensemble. Parfois, quand je réécoute nos concerts comme « Live in Bilbao » Je suis étonné de voir à quel point nous sommes synchronisés, à la fois rythmiquement et émotionnellement. Je pense que cela vient de toutes les années que nous avons passées ensemble ; je vois aussi à quel point nous continuons, tous les deux, à jouer de notre mieux chaque soir où nous montons sur scène. C’est un tel privilège d’avoir un public fidèle, nous essayons de ne jamais le décevoir.

M.: Vous avez repris « You Never Know What You're in For » de « Night Lighits » qui, pour moi, est un de vos meilleurs albums. Que ressentez-vous lorsque vous interprétez vos premiers titres ?

E.M.: Certaines tribus amérindiennes croient que si vous voulez garder vivante la mémoire de quelqu’un que vous aimez après son décès, vous devez continuer à chanter son nom à haute voix. Et dans mes propres croyances spirituelles, il en va de même pour mes chansons. Chaque soir, je me tiens devant mon micro et je chante « Last of the Rock Stars » – qui est la première chanson de mon tout premier album « Aquashow » – Je ressens toujours la même excitation que lorsque je l'ai écrite à 22 ans alors que je commençais tout juste mes aventures dans le royaume du Rock 'n Roll. Certaines chansons meurent et reviennent à la vie, mais d’autres sont toujours avec moi comme « You Never Know What You're in For » et « On Elvis Presley’s birthday » et je peux toujours me reconnecter à l’endroit et à l’époque où je les ai écrites. C’est presque une façon de voyager dans le temps !

M.: Et, en ce qui concerne le montage de cet album, je pense que vous êtes très fier du travail de Gaspard, votre fils.

E.M. : Je me souviens quand j’ai acheté à Gaspard sa première guitare électrique : il avait 12 ans, nous marchions sur le boulevard Beaumarchais à Paris et nous sommes passés devant le magasin d’instruments de musique Paul Beuscher ; il y avait une Telecaster noire dans la vitrine et Gaspard la regardait jusqu’à ce qu’il se retourne et demande s’il pouvait l'avoir. Ce n’était pas son anniversaire ou Noël, mais j’ai senti que c’était un moment spécial pour lui et nous sommes entrés dans ce magasin et sommes sortis avec cette guitare.

M. : Le début de sa vie musicale...

EM. : Oui c'était la première étape de sa vie musicale et il a parcouru un long chemin, travaillant avec des artistes français tels que Claire Laffut, Gauvain Sers et Carla Bruni en tant que producteur, ainsi qu'avec le groupe Incubus, Bruce Springsteen et le E Street Band. Chaque fois que Gaspard travaille sur un projet avec moi ou quelqu’un d'autre, il donne le meilleur de lui-même. Je sais aussi qu’il comprend ce dont j’ai besoin et j’aime plaisanter en disant que la musique d’Elliott Murphy pour lui est comme la neige pour un esquimau : cela a toujours été dans sa vie depuis le jour de sa naissance.

M.: Il y a un livre culte pour vous « Rock Dreams ». Quand l’avez-vous découvert ? Qu’est-ce qu'il évoque pour vous ?

E.M.: Si vous parlez du livre incroyable de Guy Peellaert et Nik Cohn, je l’ai découvert pour la première fois quand il est sorti en 1973 et c’était comme si chaque image était déjà dans mon cerveau. J’ai toujours considéré le rock 'n roll comme une pure mythologie et « Rock Dreams » était la première fois qu’un grand artiste et écrivain était capable de transmettre cette qualité intemporelle. Juste en regardant ces images, vous comprenez la musique, celle que ces artistes ont apportée au monde. J’ai toujours voulu que Guy Peellaert conçoive une de mes pochettes mais malheureusement il est décédé avant que je puisse le rencontrer à Paris. J’attends toujours le prochain « rock 'n roll Delacroix » ...

M.: Et ce livre a une telle influence sur vous que vous dites faire des « Rock Dreams ». Vous rêvez des musiciens que vous admirez. Bruce Springsteen, les Beatles, Bob Dylan... Pouvez-vous nous parler d’un de ces rêves, celui avec Tom Petty, par exemple ?

Je commence seulement à écrire mes « Rock Dreams » et à les mettre à la disposition des lecteurs sur Facebook. Mais, malheureusement, la plupart d’entre eux ont été perdus dans le sable du temps parce que je ne les ai pas écrits dès que je me suis réveillé. Mais je rêve encore presque tous les soirs de rock stars. J’ai eu quelques rêves à propos de Tom Petty mais dans le dernier en date, il essayait de m’apprendre une chanson et son bus de tournée brûlait. Peut-être que lorsque j’en aurai assez de mes « Rock Dreams » personnels, je les mettrai tous ensemble dans un livre et je demanderai à un grand artiste de les illustrer.

M.:  En parlant d'écriture, vous venez de publier votre journal, « Tinnitus Journals », qui nous emmène dans votre vie intérieure. Celle d’un musicien vivant à Paris. Un livre très bien illustré qui retrace plus de cinquante ans de carrière... 

E.M.: Depuis tout jeune, je garde de petits cahiers où j’écris mes pensées, mais ce n’est que récemment que j’ai commencé à penser à les rassembler dans un livre comme « Tinnitus Journals » et à mélanger des paroles, de la poésie et des photos. Le titre vient du terme médical « acouphène » à cause du bourdonnement de mes oreilles, le résultat pour avoir joué de la musique pendant plus de 50 ans. Il y a un prix à payer pour tout.

M.: Il y a quelques jours, le 28 février, Brian Jones aurait eu 80 ans. Je sais qu’il vous a « inspiré »...

E.M. : Eh bien tout d’abord il avait les cheveux blonds comme moi... ou comme je les avais et il était un dandy comme je voulais l’être. J’adorais Elvis Presley qui était une sorte de dandy rockabilly sudiste, mais je ne pouvais pas m’identifier à lui parce qu’il venait d’une génération et d’une culture différentes. Mais j’aimais Brian et comme lui, j’aime jouer tous les instruments que passent sous ma main. Je ne sais pas si j'ai déjà rêvé de Brian, mais je l’ai mentionné dans ma chanson « A Touch of Mercy » (Lost Generation 1974) où j’ai chanté: « Je marchais dans Main Street l’autre jour en pensant à Brian Jones et à la dernière escapade. » Mais heureusement, je ne suis pas aussi autodestructeur que Brian s’est avéré l’être – je l’ai vu se détruire lui-même et peut-être que cela m’a sauvé.

Site d'Elliott Murphy, ici

Version anglaise, ici

 


Propos recueillis par Marie Torres pour www.micmag.net/ Photos Michel Jolyot
Live In Bilbao
Elliott Murphy
disponible sur toutes les plateformes de streaming (Spotify, Apple Music, etc.) et en un nombre limité de CD, numérotés et signés et exclusivement disponibles sur https://elliottmurphy.com/

Tinnitus Journals - Volume 1
Disponible sur le site d'Elliott Murphy
Dates des concerts
Mars 2022
10 mars - Band Show - Spirit of 66 - Verviers, Belgique
18 mars - Band Show - New Morning - BIRTHDAY SHOW! - Paris, Franc
19 mars - Band Show - New Morning - BIRTHDAY SHOW! - Paris, France
Mai 2022
14 mai - Band Show -Château de Quenet - Le Val-Doré, France
Juin 2022
23 juin - Band Show -Blacksheep Festival - Heilbronn, Allemagne
25 juin - Band Show -Weingut Müller-Catoir -Neustadt, Allemagne

  • Facebook
  • Google Bookmarks
  • linkedin
  • Mixx
  • MySpace
  • netvibes
  • Twitter
 

ÉVÉNEMENTS

La morte amoureuse de Théophile Gautier

La morte amoureuse de Théophile Gautier au Théâtre Darius Milhaud

« Memories »

« Memories » de Philippe Lebraud et Pierre Glénat

Paul Klee, Peindre la musique

L’exposition numérique rend hommage aux deux passions de Klee, la musique et la peinture, et révèle les gammes pictural...

Alô !!! Tudo bem??? Brésil-La culture en déliquescence ! Un film de 1h08 mn

Photo extraite du film de Mario Grave - S'abonner sur notre canal Youtube  pour avoir accès à nos films :

VINTAGE & COLLECTIONS

Marché Dauphine, un marché singulier
et ultra-spécialisé

Inauguré en 1991, le Marché Dauphine est le plus récent mais aussi le plus grand marché couvert des Puces de Saint Ouen : sur deux étages et dans un espace de 6 000 m2, il abrite quelque 150 marchands d’antiquités et de brocantes. Présentation, ici.

SORTIR À PARIS

« Loading, l'art urbain à l'ère numérique »

jusqu'au 21 juillet 2024 au Grand Palais Immersif


            


BRÈVES

Madrid, 11 mars 2004

L'Espagne, mais aussi l'Union européenne, rendent un hommage solennel lundi aux 192 victimes de 17 nationalités assassinées il y a 20 ans à Madrid dans des attentats à la bombe qui marquèrent le début des attaques islamistes de masse en Europe.

 
Pablo Neruda a-t-il été empoisonné ?
Cinquante après, le Chili relance l'enquête sur la mort du poète et Prix Nobel de littérature survenue sous la dictature du général Pinochet. Cancer de la prostate ou empoisonnement ?
 
Paris 2024 : les bouquinistes ne seront pas déplacés
Paris 2024 : les bouquinistes des quais de Seine ne seront finalement pas déplacés pour la cérémonie d’ouverture des JO « Déplacer ces boîtes, c’était toucher à une mémoire vivante de Paris » a déclaré à l'AFP Albert Abid, bouquiniste depuis dix ans au quai de la Tournelle.
 
Sophie Calle et la mort !
Sophie Calle, artiste de renom, achète des concessions funéraires au USA en France et ailleurs. "J'achète des trous" dit -elle à propos de sa mort.
 
53 journalistes et proches de médias tués dans la guerre Israel- Hamas
Cinquante-trois journalistes et employés de médias ont été tués depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, selon le dernier décompte du Comité pour la protection des journalistes (CPJ)