- Agenda Wocceck à l'Opéra Bastille : une oeuvre hantée et glaçante !Jean-Christophe Mary - 13 mars 2022 Invité pour la première fois à l’Opéra national de Paris, le metteur en scène sud-africain William Kentridge revisite Wozzeck, l'oeuvre majeure d’Alban Berg et la transpose durant la Première Guerre mondiale.
Lorsqu' il crée cette nouvelle production en 2017 au Festival de Salzbourg, William Kentridge a une vision : transposer l’opéra de tiré la pièce de Georg Büchner écrite en 1830 pendant la 1ere guerre mondiale. La raison est simple : le soldat Alban Berg avait commencé l’écriture de cet opéra pendant la première guerre mondiale quand il était en permisssion. Le décor, un amoncellement de plateformes reliées par des passerelles instables, évoque le chaos d’une ville bombardée, avec en arrière plan des images de bâtiments détruits, de corps blessés, de cartes de batailles, des paysages ravagés et font écho aux films que Wozzeck montre sur un petit écran au capitaine au début du premier acte. Avec ces projecteurs braqués vers le ciel, ces masques à gaz, ces dessins de corps déchiquetés, le spectacle résonne avec une intensité particulière alors que la guerre fait rage ces jours-ci en Ukraine. Cet opéra porte en lui toute une violence et une folie engendrée par le désespoir. Une violence infligée sur Wocceck par le capitaine, le médecin et le tambour major. L'oeuvre pose la question de la violence envers les hommes, la violence envers ceux qu’on aime comme réponse à la pression, au désespoir est une question très contemporaine au vu de la guerre Russo-Ukrainienne. La musique n’est pas réputée facile d’accès car peu familière. Mais plus on l’écoute, plus on dénote un certain lyrisme, plus on ressent à quel point chaque note est vitale, essentielle. La distribution est dominée par les interprètes principaux. Johan Reuter campe un Wozzeck hagard, en déshérence qui porte en lui le malaise que nous éprouvons face à ses angoisses. La voix est solide et bien projetée, le style élégant. Eva-Maria Westbroek propose une Marie pleine d’humanité dont elle traduit les multiples affects, la tendresse, la coquetterie, la peur, avec une voix pleine, un timbre captivant. A leurs côtés, la distribution est solide. Le médecin interprété par Falk Struckmann est une sorte de Dr Frankenstein machiavélique prêt aux expérimentations les plus folles. Doté d’une voix robuste, John Daszak s'impose dans le rôle du Tambour-major viril tandis que Gerhard Siegel campe un capitaine lâche et cruel. Soulignons également la belle prestation de Tansel Akzeybek dans le rôle d’Andrès et celle de Marie-Andrée Bouchard-Lesieur, espiègle à souhait; dans le rôle de Margret. Saluons aussi la direction musicale de la cheffe Susanna Mälkki qui combine force et sensibilité et la performance des artistes du chœur qui apparaissent en pantins désarticulés comme emportés dans une valse funèbre. Une oeuvre glaçante que vous pouvez écouter et voir jusqu’au 30 mars Jean-Christophe Mary pour www.micmag.net
Wozzeck
OPÉRA Alban Berg Opéra Bastille - du 07 au 30 mars 2022 1h35 sans entracte De 15 à 131 euros |
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