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Epidémie, une source d'inspiration pour les auteurs de tous temps

Marie Torres - 22 mars 2020
Deni, peur, impuissance, manipulation, mensonge... L'épidémie a depuis des millénaires inspirée les écrivains qui l'ont utilisée pour dénoncer la violence, l'injustice, le nazisme ou encore l'omerta. Certains l'ont fait avec gravité, d'autres avec humour. Petite sélection.

L'épidémie prend une dimension mythologique et littéraire avec les tragédies grecques. Dans Oedipe Roi, Sophocle (496 - 406 av.J.C.) évoque la peste qui s'abat sur Thèbes. Grâce, ou à cause, de ce fléau son héros découvrira son tragique destin. Des siècles après, La Fontaine (1621-1695) reprend ce thème dans Les animaux malades de la peste pour dénoncer l'injustice. Depuis, nombre de grands écrivains ont repris le sujet. 

Josep Pla, Le cahier gris (Journal) (1918)
Trad. du catalan par Serge Mestre
Editions Gallimard, 31 euros
1918, alors que Josep Pla étudie le droit à Barcelone, le pays est touché par la grippe espagnole. La faculté ferme ses portes et le jeune homme retourne vivre dans sa famille à Palafrugell, petit village de l’Empourdan. Il commence alors son journal et nous fait partager la vie quotidienne de sa famille et ses amis d'enfance. En janvier 1919, il s'en retourne à Barcelone et nous entraîne sur les ramblas où il fréquente les cafés et l'Ateneu, un cercle intellectuel. Son journal s'achève en novembre 1919, lorsqu'il est envoyé à Paris comme correspondant de presse. Un témoignage plein de discernement et d'humour qui fait dire que le Cahier gris est un des "monuments de la littérature catalane" tout en restant un ouvrage radicalement cosmopolite.

Albert Camus, La Peste (1947)
Editions Gallimard, 7,50 euros
« Nos concitoyens s’étaient mis au pas, ils s’étaient adaptés, comme on dit, parce qu’il n’y avait pas moyen de faire autrement. Ils avaient encore, naturellement, l’attitude du malheur et de la « souffrance, mais ils n’en ressentaient plus la pointe. Du reste, le docteur Rieux, par exemple, considérait que c’était cela le malheur, justement, et que l’habitude du désespoir est pire que le désespoir lui-même
La Peste d'Albert Camus est le Roman de l'épidémie. Dans les années 40, au coeur de la ville d'Oran, en Algérie, la peste s'installe. De plus en plus violente, elle multiplie les victimes. Alors qu'un journaliste, Rambert, recherche son amie et que le Père Paneloux accuse la population d'être responsables de la colère divine, Camus nous fait vivre chaque étape du parcours de la maladie et du combat des hommes. Avec cette question cruciale : quelle attitude adopte ? Un des plus beaux romans de Camus.

Jean Giono, Le Hussard sur le toit (1951)
Editions Folio, 9,10 euros
« Est-ce qu'on a le droit d'abandonner un être humain? Et même s'il meurt, est-ce qu'on ne doit pas tout faire pour qu'il meure moins mal si l'on peut ?1838. Angelo, hussard italien, arrive à Manosque où une épidémie de choléra fait rage. Les routes sont barrées, les villes barricadées, les voyageurs mis en quarantaine et les autorités l'accusent d’empoisonner les fontaines de la ville. Son seul refuge : les toits de la ville d'où il observe l'agitation des hommes et la beauté des paysages de Provence et s'insurge contre ce mal qui selon lui révèle la "saloperie de l'homme".

Marcel Pagnol, Les Pestiférés (1977)
Editions Klett Libri, 10,90 euros (existe en BD, 19,90 euros
« L’ennui et la peur commencèrent bientôt à dérégler les mœurs de ces bonnes gens, et il y eut un grand nombre d’adultères, dont personne d’ailleurs ne sembla se soucier beaucoup, sauf le boucher Romuald, qui enrageait d’être cocu, mais que Pancrace consola par les considérations philosophiques d’une si grande beauté que le boucher, ayant fait cadeau de sa femme au boulanger, se mit en ménage avec la petite servante de l’épicier. Elle en fut bien aise, car elle craignait, depuis le début de la contagion, de mourir pucelle »
Cette nouvelle inachevée de Marcel Pagnol et parue après sa mort, revient sur l'épidémie de peste survenue à Marseille en 1720 et nous entraîne dans les mésaventures d'une petite communauté face au fléau. Avec sérieux mais aussi beaucoup d'humour. Et certaines situations de "profiteurs" ou de lanceurs de "fake news" rappellent étrangement ce que nous vivons...

Thomas Mann, La montagne magique (1924)
Traduction Maurice Betz
Editions LGF, 4,90 euros
« L’homme ne vit pas seulement sa vie personnelle comme individu, mais consciemment ou inconsciemment il participe aussi à celle de son époque et de ses contemporains »
Un jeune homme, Hans Castorp, se rend en Suisse pour passer trois semaines auprès de son cousin en traitement dans un sanatorium. Mais pris dans l'engrenage étrange de la vie dans ce milieu confiné, il va y séjourner sept années. Une période d'apprentissage et de d'échanges intellectuels auprès de personnages aussi différents que le positif Settembrini et l'anarchiste nostalgique, Naphta. C'est la Première guerre mondiale qui le sortira du sanatorium pour l'entraîner sur les champs de bataille. Le chef-d'oeuvre de Thomas Mann.

Jean-Marie Gustave, La Quarantaine (1995)
Editions Livre de Poche, 10,30 euros
Roman écrit à partir d'un épisode de l'histoire du grand-père de Le Clézio, La Quarantaine est le récit de voyageurs qui se retrouvent bloqués sur un îlot volcanique de l'océan indien pour cause d'épidémie de variole. Contraints de cohabiter, ils vont vivre dans la peur et l'angoisse de la maladie.

Philip Roth, Némésis (2010)
Traduction Marie-Claire Pasquier
Editions Gallimard, 8 euros
« Le premier cas de polio, cet été-là, se déclara début juin, tout de suite après Memorial Day, dans un quartier italien pauvre à l’autre bout de la ville. »
Etats-Unis, été 1944. Alors que la plupart des jeunes hommes sont sur le front, Bucky Cantor est réformé à cause de son strabisme. Il culpabilise de cette situation jusqu'au moment où le Mal, sous le masque de la polio, sème la terreur dans sa petite ville de Newark. L’épidémie se propage rapidement et les enfants sont les plus exposés. Avec le talent qu'on lui connait, Philippe Roth dépeint avec toute une gamme de sentiments, de la peur à la solidarité en passant par l'égoïsme et le courage, un drame qui n'est pas sans rappeler celui de la Shoa.

Marie Torres pour www.micmag.fr

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