Paris - Musique

Rentrée musicale : découvertes qui décoiffent !

Stephane de Langenhagen - 25 septembre 2012
Petite sélection des nouveautés marquantes de la rentrée, toujours surprenantes et métissées. Certaines étaient particulièrement attendues. D'autres sont de véritables surprises. Micmag booste la rentrée automnale.
© Lisa Roze

A l’heure où un sursaut d’intérêt pour les CDs s’empare de nos amis brésiliens, voici un petit tour d’horizon des nouveautés hexagonales marquantes de la rentrée, avec en tête de liste, le nouvel album de Lucas Santtana « O deus que devasta mas também cura » (le dieu qui dévaste mais aussi qui soigne), un titre à faire pâlir les détracteurs « responsables » de Charlie Hebdo. Moins minimaliste et infiniment plus arrangé et orchestré que « Sem Nostalgia », voire carrément symphonique, cet album d’une extraordinaire densité, est basé tout comme le précédent sur un travail sonore de samples et de parties jouées.

Lucas Santtana, qui retrouve son fils et ses neveux sur un Dia de furar onda no mar apaisé

Kassin, le producteur Chico Neves, et tout le gratin paulista ont répondu présent : Céu, Curumim, le génial trompettiste Guizado, Marcos Gerez de Hurtmold, Rica et Gui Amabis, Gustavo Ruiz le frère de Tulipa, Maurício Fleury de Bixiga 70 ou encore Luca Reale de Nouvelle Cuisine, illuminent des morceaux comme Músico, O Paladino ou Vamos andar pela cidade. Composée un soir de grande tempête, l‘ouverture éponyme de l’album donne le ton avec l’Orkestra Rumpilezza de Letieres Leite, où l’on comprend que dévastation coïncide avec séparation, et où il va falloir tout reconstruire. Mais loin de plomber l’ambiance, la rupture s’avère finalement salvatrice pour Lucas Santtana, qui retrouve son fils et ses neveux sur un Dia de furar onda no mar apaisé, et qui continue d’exprimer sa fascination pour les beats percussifs et les sons vidéo-game de la technobrega (Jogos madrugais, Ela é Belém). Qu’on se rassure, le génial Lucas a depuis répondu à Pra onde irá essa noite ?, le morceau de toute beauté qui clôt l’album, et se trouve actuellement en particulièrement bonne compagnie.

Beaucoup de filles en cette rentrée, d’abord celles dont on espère trouver bientôt les albums dans les bacs, citons Gaby Amarantos avec « Treme », grande gagnante des VMB Awards, l’équivalent des MTV Music Awards, et surtout Tulipa Ruiz avec « Tudo Tanto », sacré meilleur album de 2012 (devant ceux de Lucas Santtana et de Gal Costa) au dernier Prêmio Multishow.

Mais la sortie féminine la plus attendue, cause report, c’est celle du deuxième album de la belle Niuver, chanson jazzy et boléro sentimental version major. « Trasnochando », la suite parisienne de « Quiereme mucho » a été confiée à des proches de Sergent Garcia. D’où les titres en français sur les jeux de l’amour, une série de tubes en puissance : Mi corazón, no, C’est toi que j’aime, et un N ‘importe quoi signé Tom Poisson, un brin lourdingue. 12 ans d’hexagone forcément ça change une cubaine. D’ailleurs, c’est lorsqu’elle compose dans sa langue d’adoption que Niuver donne l’impression d’être maintenant la plus à l’aise. Mais à l’image de la pose peu naturelle de la pochette, le français ne lui sert finalement qu’à exprimer une forme d’insouciance, comme si elle avait souhaité réserver ses vraies émotions pour les chansons en espagnol (Despedida, No te llevaré a mi esla, Dime). Dommage qu’on doive naviguer entre des moments de pop épurée (Bajo el sol, Encuentro) et un duo anecdotique avec Oxmo Puccino pour découvrir les perles de l’album, Trasnochando au parfum brésilien et à la rythmique vraiment prenante, et surtout Sé que te vas de Paris, qui combine intensité vocale et force des arrangements. Finalement, on finit presque par regretter le manque de percussions latines, mais on l’avait compris, ce n’est pas le propos de la jeune demoiselle, qui a déjà bien du mal à trouver sa place dans une scène française archi encombrée. A suivre.

A la tête de la marque +BezemYMailan+, la styliste Mai Lan (prononcer Maïe Lane), imprégnée de plein d’univers, mêle le moderne à l’ancien. Elle confectionne et commercialise des vêtements joyeux, ethniques et iconoclastes dignes de son père, un certain Kiki Picasso, du collectif Bazooka, qui a révolutionné le graphisme dans les années 70. Son côté physique. Sa mère est vietnamienne, artiste également, son frère, Kim Chapiron est cinéaste, et la fait chanter dans son premier film. Ca y est, le virus a pris, impossible de faire marche arrière. Mai Lan s’enferme alors avec son ami multi instrumentiste et ingénieur du son pour laisser sortir ce qu’il y a en elle, sans complexe, toutes ces références musicales qu’elle a accumulées de part et d’autre. La liste est longue, on dirait une play-list de FIP, c’est dire l’inspiration qui l’habite depuis toujours. Le résultat, ce premier album un peu déjanté qu’elle a voulu presqu’entièrement en anglais, est une grande claque dans la morosité des plans sociaux de la rentrée. Ca démarre comme le premier Ting Tings, qui continue de nous faire pogotter dans tous les sens : Easy, Shumacher, Hard Joy, ces titres sont une énorme bouffée d’optimisme, contagieuse, qui nous amène à la moitié de l’album vers des rivages poétiques étranges et surréalistes peuplés de créatures imaginaires (Les Huîtres, Le Dahut). Son côté cœur, qu’elle laisse s’exprimer en portugais sur le morceau caché, en duo avec le rappeur brésilien Antonio Sodré Schreiber. D’une extrême richesse, ludique, et sans limites, cet album est loin d’être un caprice d’adolescente pressée, c’est l’expression aboutie d’une artiste viscérale, aux visions psychédéliques, qui nous livre avec intelligence et pudeur ses moments de joies, ses doutes, ses angoisses, ses rêves, ses interdits. Acceptons-les comme un intense moment de plaisir, de l’art jouissif à découvrir de toute urgence.


Stephane de Langenhagen
« O deus que devasta mas também cura » : Lucas Santtana (Mais Um Discos, distribué par Differ-ant)
« Trasnochando »: Niuver (Sony)
« Mai Lan » : Mai Lan (3ème bureau, distribué par Wagram)

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