Céret - portrait

Joséphine Matamoros s’en va, une page se tourne au Musée d’Art Moderne de Céret

Dorothée Berhault (Perpignan) - 10 mai 2012
Son nom est étroitement lié au musée d’Art Moderne de Céret. Avant de prendre définitivement sa retraite, Joséphine Matamoros prépare pour le 16 juin prochain, sa dernière grande exposition à Collioure, retour sur 25 ans de parcours.

Picasso, Soutine, Derain, Matisse, Duchamp, Tapiès (décédé le 6 février dernier), autant d’illustres noms qui ont fait l’affiche du Musée de Céret.

De New York à Paris, de Bruxelles à Berlin, certaines de leurs oeuvres sont exposées sur les cimaises des plus grands musées internationaux, ou bien appartiennent à des collections particulières.

Mais sait-on que ces mêmes artistes ont tous, à un moment donné de leur vie, séjourné sur la côte Vermeille, à proximité du petit port de pêche de Collioure, là où les Pyrénées plongent dans le Bleu Méditerranée ? Cette terre, imprégnée d’une forte idendité catalane, a nourri le parcours artistique de ces peintres du début du XXème. Les premiers s’appellent Henri Matisse et André Derain.

Du fauvisme au mouvement support-surface

“J’ai voulu repositionner l’histoire de cette region à travers ces peintres qui sont venus ici, attirés par l’intensité de la lumière. Collioure, comme Céret, sont des lieux hautement stratégiques dans l’évolution de la peinture moderne et de ces courants : dès 1905, c’est l’émergence du fauvisme avec Derain et Matisse. Puis 10 ans plus tard, Braque et Picasso sont du voyage.  Après leur séjour,  l’écrivain et critique d’art, André Salmon, parle de Céret comme la “Mecque du cubisme”. Juan Gris, Max Jacob, Auguste Herbin suivront. Les artistes locaux comme Etienne Terrus ou Aristide Maillol, ne sont pas en reste. Une histoire artistique en évolution constante qui se poursuit aujourd’hui avec le mouvement "support surface" ou encore le "BMPT" des initiales de quatre artistes contemporains.

"Ce fut une chance inouïe pour moi d’être alors nommée directrice"

Nous sommes en 1986. Le musée, dont les prémices ont été jetés en 1950 par Pierre Brune et Franck Burty Havilland, est entièrement reconstruit, aussi bien dans la forme que dans le fond. Vaste chantier.

Le contexte historique de part et d’autre de la frontière est alors particulièrement propice au changement.

"C’est vrai que ce fut une chance inouïe pour moi d’être alors nommée directrice. Au sud, le régime de Franco avait fini par s’effondrer. S’en est suivie une véritable explosion de vie et de joie pour les Catalans du sud. C’est ce qu’on appellera "la Movida". En France, la Gauche était au pouvoir et le ministre Jack Lang donnait à la culture une place prépondérante. Quand nous étions en train de reconstruire le nouveau musée, au même moment en France, il y avait près de 180 autres chantiers. C’est énorme quand vous y repensez!" se souvient Jospéhine Matamoros.

En 1993, le président de la République, François Mitterand, fera le déplacement jusqu’à Céret pour inaugurer le nouveau bâtiment à l’architecture très contemporaine. Le peintre catalan, Antoní Tapiès y signera une céramique murale de 4 mètres à l’entrée. Céret, petite bourgade de 8000 âmes, a désormais son musée d’Art Moderne, digne de ce nom.

Sa conservatrice travaillera sans relâche pour lui établir une belle renommée. Un pari audacieux.

En 25 ans, ce sont 130 expositions qui seront proposées : Soutine, Chagall, Viallat, Braque, Brune, Gauthier. Des collections particulières comme les céramiques de Picasso ou des toiles de Tapiès sont constituées. "Aujourd’hui, des visiteurs  des quatre coins du monde viennent à Céret, pour le musée, mais aussi pour découvrir la beauté des paysages et marcher sur les traces des plus  grands artistes. Et puis, vous avez les autochtones qui apprennent comment leur pays a participé à l’essor de l’art moderne. Cette passerelle, à mes yeux, est primordiale : il fallait que les  habitants puissent se réapproprier une partie de leur histoire qui a été égarée et qu’ils retrouvent d’une certaine façon, leur fierté.”

Fille d’immigrés Catalans, Joséphine arrive à Perpignan à l’âge de 7 ans. Aujourd’hui, plus que jamais, elle se définit comme "une femme de frontière possédant une conscience aigüe de la notion de territoire" et donc de culture catalane. Elle n’aura de cesse de la faire connaître avec des expositions consacrées à Riera I Arago, Juan Gris, Tapiès, Joan Miró

Une dernière exposition

Depuis le 17 janvier dernier, (date de sa naissance) Joséphine Matamoros a passé la main et avoue n’avoir aucun regret :  "Le travail fut dense et parfois diffcile mais toujours passionnant. J’ai été jusqu’au bout de mon projet et c’est ce qu’il y a de plus important, je crois. Mais j’ai fait mon temps et il faut savoir s’arrêter".

Un départ mûrement réfléchi avec une dernière exposition de grande envergure : "Léopold Survage 1925-1932".  32 oeuvres de l’artiste français d’origine russe seront exposées au chateau royal de Collioure durant tout l’été. Elles proviennent des plus grands musées amércains et européens. Certaines, issues de collections particulières, seront montrées pour la première fois.

Survage est venu séjourner à Collioure pendant quelques années. Fidèle à elle-même , Joséphine Matamoros a donc décidé de réserver la toute première journée de cette exposition aux habitants de Collioure. Un juste retour des choses.

Survage : 1925-1932

Du 16 juin au 30 septembre 2012 au Musée d’art moderne de Collioure - Tél : 33 (0)4 68 82 10 19

Nathalie Galissot, la nouvelle Conservatrice de Céret :

Depuis le 1er février dernier, Nathalie Galissot a pris les rênes du musée de Céret, succédant ainsi à Joséphine Matamoros. Spécialiste des arts du XXème siècle, elle a été adjointe du Conservateur du musée des Beaux-Arts de Quimper pendant huit ans. Cet été, elle rendra hommage au peintre catalan Antoní Tapiès, disparu le 6 février dernier, laissant derrière lui une oeuvre monumentale, soit 50 ans de recherche et de création. Fervent défenseur de la culture catalane, l’artiste est considéré comme un artiste universel.

"Images, Corps, Pathos" : Hommage à Antoni Tapiès.

Du 30 juin au 14 octobre 2012 au Musée d’art moderne de Céret.                                      Tél : 33 (0)4 68 87 27 76




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