20-01-2011 13:50:24

Art populaire : l'exceptionnelle collection Claude R.

Soixante ans de collections, c’est toute une vie consacrée à la passion des objets de nos terroirs. Voici ce qu’à sauvegardé le grand collectionneur Claude R. en passant au crible toutes les régions de l’hexagone. Visite émerveillée dans un joyau de l’art populaire du côté de Montpellier.

C’est dans un petit coin tenu secret de notre grand sud de la France que Claude et sa femme Françoise ont bâti une des plus belles collections d’art populaire français. Soixante années de chine et sans cesse sur la brèche (la collection de référence du musée de Laduz s’est constituée en trente ans - voir plus bas) voilà un véritable vivier ludique et instructif. Chez ce retraité de Radio France, les expériences de chine sont croustillantes, la connaissance du marché et des objets est immense. Couteaux, imagerie populaire, vierges, christs, collection d’effigies de Napoléons, objets de bagne, ivoires coloniaux, de maréchal-ferrant, moules à gâteaux, mortiers phalliques, peinture naïve, objets de compagnon, bijoux religieux, etc. se disputent un bout de buffet, de table ou s’exposent sur tous les murs, dans les placards, entre les portes ou les fenêtres d’une bâtisse nichée sous la pinède. –« Poussez donc cet objet que je puise en caser un autre » tente de dire à tout instant Claude R. 80 ans, qui sort des placards, des boîtes à bijoux remarquables. Puis il ajoute : « mais nous ne sommes pas des petits maniques de l’objet, chez nous c’est autre chose qui nous anime ! » Son corps vibre d’une passion quasi religieuse, ensorceleuse, lui qui se dit agnostique mais tout de même attiré par les esprits des objets qu’il convoite ou qu’il possède. Intrigué par la force médiumnique de certains tableaux, cet ex-homme de radio sait comment méduser son auditoire. Ici, loin de la ville et de l’agitation, c’est un foisonnement de créatures inanimées qui ne se chiffre plus, qui vibre de l’amour et du regard que leur porte les propriétaires. Cuisine, salon, chambre à coucher, toilettes exhibent ces détails farouches, parfois cruels et le plus souvent touchants.

Célébrer l’émotion

Ces bouts de vie chargés d’émotion, non sans une pointe d’humour, ont aussi une marque de dérision de l’anonyme créateur qui en son temps a gravé, cousu, brodé, peint, forgé ou sculpté. Il le fit sous l’émotion d’un événement important de sa vie, la mort d’un être cher, un mariage à célébrer. Artistes anonymes ont ici recueilli le respect dans un temple privé sans code qui a pris des allures de musée improvisé. L’heureux visiteur entré dans ce chantre de la collection, ne sait plus vers quel christ en bronze se vouer, vers quel portrait de conscrit se tourner, quelle œuvre de bagnard choisir. Si vous débutez la visite par l’entrée de service la collection de hachoirs ouvre le bal des incongrus. Hachoir avec tête de renard, de cerf, de petit oiseau, de cochon, de pigeon, de femme, d’homme car la fête des goûts ne fait que commencer. Pour poursuivre, un quart à gauche voici une collection de grills ouvragés. Soyez attentifs, observez bien à chaque fois la particularité ou la preuve d’amour du forgeron. Nous sommes donc entrés par la « cantine militaire » c’est ainsi que le maître de maison désigne la cuisine car un tableau de la guerre du Tonkin qui représente un artilleur de marine dans sa batterie, ouvre la thématique d’une des plus importantes collection-maison : la guerre de 1870.Le souvenir militaire de la IIIe République côtoie allègrement et délicieusement les moules à gâteaux. Une pendule faite par un maréchal- ferrant à Lunéville fait face à une enseigne de sabotier. Et ainsi de suite, les familles d’objets tentent d’échapper à l’intrusion d’un nouveau genre ou d’une collection auxiliaire. La collection de porte-clefs d’hôtels (déclarée comme auxiliaire) est ainsi proche des enseignes de sabotiers dont une est remarquable par sa taille et son serpent ensorceleur autour du sabot. Le sabot est ici vénéré et pour cause, un arrière grand-père était de la profession. Les reposes fers dont certains du XVIIIe offerts jadis en cadeau de mariage ou simple preuve d’amour sont parfois datés et signés. Il y a même le repose fer de la bonne du curé avec sa croix sculptée. L’un d’entre’eux est fort coquin : l’utilisatrice posait son fer brûlant sur le dessin gravé d’un amant égaré !

Un canne pour achever les blessés !

Dans le salon, attardons nous sur l’un des thème récurrent : la III e république avec un tableau représentant une des scènes de cette période. Parmi les sculptures en bois en voici une de la guerre de 14 avec un blessé du régiment de Saintes. Mais revoilà la guerre de 1870 avec un tableau représentant une scène de bataille. Et Voici un cendrier en bronze « pour lequel je me suis battu pendant des années pour l’arracher à l’antiquaire qui l’avait. C’est un souvenir de la Commune de Paris du 26 mai 1871. La Commune fut écrasée le 28 mai, c’est un boulet à charge creuse. »

Et puis la visite se poursuit par un Pichet Prévelle (Sarthe), un chef d’œuvre de compagnon bourrelier en cuir brodé. Parmi la petite collection de cannes près de la cheminée, il y en a une avec un travail de fer japonais et incrustations de feuille d’or. Celui qui l’avait acheté a fait graver une fleur de lys (il était royaliste) et y a inscrit la date du 3 mai 1871. « Ce gars-là durant la Commune s’apprêtait à achever les blessés avec sa canne ! Et oui, les objets parlent. La Commune empoisonnait la vie des bourgeois parisiens.» Dans la suite de la visite voici un encrier du Queyras en pierre ollaire, très recherché à juste titre, représentant un buste avec les bras et puis une tête de monstre qui fut chiné à Perthuis un 13 juillet se souvient avec exactitude notre retraité qui a conservé une excellente mémoire. Sur le bureau très chargé, lui aussi, voici un fragment d’obus tombé sur l’hôpital la Salpêtrière le 8 janvier 1871. Derrière le bureau, des brevets de maîtres d’armes crées par Leclair en 1830 (un grand dessinateur naïf qui faisait des brevets au début du XIXe). Sur une table du salon, un travail de compagnon représentant des bagnards militaires n’est autre qu’un mécanisme animé. « On m’avait signalé la sortie de cet objet à Montmartre pour 700 francs chez un brocanteur qui méconnaissait les oeuvres. Je le trouve chez un grand antiquaire rue de Beaune (Paris 7e) deux mois plus tard et lui demande le prix. Celui-ci me répond par :-« Ce n’est pas si simple ! A un certain niveau, l’argent ne compte pas. Je sais que vous avez une poupée du nord-ouest des Etats Unis, vous me la donnez et je vous paie en plus 10 000 F ». J’ai accepté car je suis un collectionneur d’art populaire français. Suite de la visite par une famille de bustes sculptés de Napoléon. De tailles différentes, certains ont un côté naïf et touchant. « Le personnage fut un génie organisateur » dit de lui notre collectionneur. Pour changer de registre, Claude saisit de la faïence stannifère de Bordeaux d’inspiration japonaise, du Vieillard très rare du XVIIIe aux couleurs originales. « La vraie richesse lorsqu’on est collectionneur est d’en avoir derrière les portes » sourit Claude en observant dans un recoin un tableau à la gouache, un portrait de militaire dans une ville de garnison de 1870. Ce tableau fait partie d’une famille d’œuvres (plus d’une quarantaine de tableaux dont un est réalisé en perle de verre). « C’était exécuté par des gens qui n‘étaient pas peintres professionnels ». S’ensuit un collage remarquable de papier peint et de tissus qui met en scène la République. L’œuvre demande l’amnistie pour les communards en 1878. Sous une chaise, encore une collection cachée (ou en attente de consécration) de casse pignons espagnols du XIXe siècle, encore des merveilles de détails sculptés à la forge dont certains étaient utilisés pour les prières en montagne.Dans l’entrée officielle, voici le sabre et le goupillon, un tableau naïf représentant le tzar à Paris en 1893, un porte-chaleil auvergnat (fait pour suspendre la lampe au-dessus de la table), une plaque de dentelière du XVIIIe. Mais la visite semble inépuisable. Claude sort des boîtes de bijoux, des couteaux espagnols du XVIIIe siècle de quoi ennivrer votre esprit des semaines durant.

H.M.


 

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