07-12-2011 13:17:33

Benjamin Minimum du magazine Mondomix : "Nous devons rendre des comptes tous les mois au Tribunal de commerce"

Le magazine musical français (Web et papier) Mondomix connaît de graves difficultés financières. Benjamin Minimum, rédacteur en chef, constate que le seul moyen de survivre est la diversification des activités. Témoignage.
Par Iris Sergent (Paris)


Malgré une fréquentation mensuelle moyenne de 300 000 visiteurs uniques par mois, Mondomix, le Web magazine des musiques du monde, connaît de graves difficultés financières. Idem en ce qui concerne la version papier. Benjamin Minimum entre dans le détail.

Micmag : comment es-tu entré chez Mondomix ?

BM : Le site Internet à été lancé en mars 1998. Je suis rentré peu de temps après et me suis mis à travailler pour Mondomix : j’étais la première personne à temps plein. A l’époque, j’avais une connaissance très approximative des musiques du monde, bien que je fusse un grand lecteur de presse musicale.  Néanmoins, je commençais à trouver que les musiques anglo-saxonnes tournaient en rond… Je n’avais pas loin de quarante ans : c’est une période où je recherchais le côté sens, l’ouverture sur le monde. Au début c’était par jeu, puis j’ai découvert des artistes, des univers et des cultures passionnantes.

Micmag : quand est-ce que le site a "décollé" ?

BMIl y a eu plusieurs étapes. La première a été de se faire connaître du milieu. Au début, pour avoir une info, il fallait galérer surtout qu’Internet n’était absolument pas considéré comme quelque chose de sérieux. On nous rigolait au nez, à part quelques personnes. Après, on a eu plus de chance avec certains labels et festivals. L’histoire de Mondomix est véritablement née en 1999.  On a fait un reportage au quotidien, sur un festival qui s’appelait "Femmes d’Algérie". Et là, on a découvert deux artistes : Hasna El Bécharia, une chanteuse du Sud Algérien proche du Maroc et des musiques Gnawa et Souad Massi. Ça, ça nous a positionnés de manière assez sérieuse dans le métier. On a mis 5/6 ans à décoller avant de pouvoir recruter des gens. On était une équipe de passionnés. Marc Benaïche, qui a toujours eu une vraie vision,  a depuis le début adossé l’activité à des activités plus rentables de prestation de services multimédia. Après il y a eu des subventions et des projets de numérisation du catalogue dans les années 2000. Puis on est rentré dans le cadre de projets européens sur la numérisation des catalogues indépendants de la musique du monde. On a eu des distinctions aussi à l’Unesco qui à un moment valorisait certains sites de contenus.

Micmag : pourquoi le créneau des musiques du monde ?

BMLe créneau des musiques du monde ça a été des circonstance pour moi. Marc Benaïche, qui est le directeur et le fondateur de Mondomix,  était associé à un gars dont le projet était d’avoir une vitrine éditoriale sur Internet. Et il y a une vraie adéquation entre Internet, qui est un réseau mondial, et les musiques du monde : c’est une évidence.

Micmag : quand est-t-il devenu opportun de sortir la version papier ?

BMEn 2003, Philippe Krümm qui avait déjà participé à pas mal de magazines et qui avait aussi une expérience dans l’Internet éditorial avec Nova, est venu nous proposer de lancer un magazine gratuit sur les musiques du monde qui s’appellerait Mondomix. Krümm a financé en partie pendant un an Mondomix qui n’était absolument pas rentable. Puis un jour, il a arrêté.

Micmag : pourquoi avoir relancé Mondomix 2004 ?

BMPendant cette année de publication, on s’est aperçu qu’on avait gagné en notoriété : les majors s’intéressaient à nous, nous envoyaient des disques ; des gens commençaient à investir. Le fait que cela s’arrête avait créé un manque. Donc on a cogité là-dessus pendant un an. Puis on a décidé de reprendre l’activité en elle-même en engageant des personnes dédiées au marketing et à la recherche publicitaire en interne. Financièrement, avec le temps, les revenus publicitaires sont arrivés à couvrir la publication et les prestations extérieures mais pas les salaires. On a réduit le nombre de tirages : on tirait à 100 000, maintenant on doit être à 80 000. On est essentiellement sur Paris et un peu sur la province, via nos réseaux de diffusion.

Micmag : et maintenant, les activités de Mondomix sont-elles rentables ?

BMLes activités média et papier peinent à trouver un équilibre mais c’est ce qui amène la notoriété et la prise en considération. La rédaction est réduite en fixe à deux personnes, le reste ce sont des pigistes, des stagiaires, des passionnés.  Aujourd’hui, on essaie de s’ouvrir vers d’autres choses : le cinéma, la littérature… Et puis les musiques du monde, ce n’est pas qu’une histoire d’esthétique, c’est une vision du monde, surtout aujourd’hui où on renvoie des africains, où on chasse des Roms, où on dit que l’intégration ne sert à rien et qu’il faut arrêter. Du coup, si on travaille sérieusement sur ces musiques-là, on est forcément militant. Donc, ce côté-là, on l’a développé : on a fait un dossier sur l’esclavagisme, on a travaillé sur l’anniversaire des indépendances, sur les Roms… D’un point de vue intellectuel, il y avait une évolution naturelle vers ça. On a aussi beaucoup de créations, beaucoup d’archives. Aujourd’hui, grâce à ça, on a plein de visites. Les revenus publicitaires arrivent à payer grosso modo le travail des pigistes et la publication mais n’arrive pas à payer tout le travail interne. Du coup, on a plusieurs activités. Il y a l’Atelier 144, qui travaille sur les prestations extérieures. On a aussi un pôle de création audio-visuel (qui nous a permis entre autres de vendre un programme à TV5 qui s’appelait "Mondomix minute" et qui était des portraits en 2 minutes). On a lancé une plateforme de téléchargement média mais qui ne fonctionne pas, donc on arrête cette activité. On a un pôle rédactionnel. Dans les locaux, nous disposons aussi d’un espace conçu pour donner des petits concerts avec une salle et tout un équipement pour faire des captations de concert et les diffuser sur Internet. Ce n’est pas une salle ouverte au public, c’est un lieu pour faire des show case à moindre prix. Mondomix en profite : nous partageons ce lieux avec un groupement d'employeurs (Paris Mix).  On y organise des concerts filmés avec Arte Live Web, qui eux sont nos clients. Mais nous sommes tout de même en redressement judiciaire et nous devons rendre des comptes tous les mois au Tribunal de commerce.

Micmag : alors, comment s’en sortir ?

BMEn décembre 2010, on a lancé la première exposition multimédia sur l’histoire des musiques noires à Dakar. L’idée est de montrer que toutes les musiques urbaines aujourd’hui découlent des musiques africaines, que le germe vient de là : on raconte toute l’exportation de ces musiques et l’apport des autres cultures. Au démarrage, il y a une trentaine de portraits d’artistes essentiels, tout genre confondu.  Cette exposition a été très repérée, notamment par Bertrand Delanoë qui en a vu l’intérêt politique. D’une part, il y a une grosse communauté africaine à Paris. Puis on s’aperçoit que ça parle de l’histoire de l’Afrique et que ça fait écho au fameux discours de Dakar. Et au-delà de Dakar, il y a eu une présentation de cette exposition à Bahia. Le mois dernier il y a eu une exposition au Ghana. Nous avons réalisé une autre version importante de l’exposition pour la Réunion. A chaque fois nous rajoutons des modules sur les musiques du pays. Les projets multimédia intéressent beaucoup de gens et notamment les musées en France… C’est peut-être ce qui va nous permettre de nous en sortir. Nous sommes confiants, puisque nous avons une proposition de la Cité de la Musique à Paris pour 2014. On va accentuer les captations pour s’en sortir : mais les dossier CNC sont compliqués à monter.

Micmag : comment soutenir Mondomix ?

BMOn a lancé le cercle des amis de Mondomix qui se développe lentement. C’est une association qui peut récolter des fonds, si cela grossit, nous constituerons à terme une part importante de l’actionnariat du magazine.

 

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