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Entretien avec Patrick Tudoret sur son dernier livre, « La gloire et la Cendre »

 - 10 mai 2021
Patrick Tudoret revient en librairie avec « La Gloire et la Cendre », l’ultime victoire de Napoléon, récit flamboyant, à la fois historique et romanesque, d’une extraordinaire épopée, celle du retour des cendres du grand exilé de Sainte-Hélène. Entretien.

Votre ouvrage commence par, ce qui est son sujet central, le transport du corps de Napoléon 1er de Courbevoie jusqu'aux Invalides, le 15 décembre 1840, pourquoi ce jour en particulier ?

Patrick Tudoret : Vous avez raison de parler du corps de Napoléon Bonaparte car, en effet, il s’agit bien de son corps - malgré toutes les théories de substitution etc. – et non de ses cendres. Si l’on parle du retour des cendres, comme je le précise dans mon livre, c’est parce que Napoléon lui-même, dans son testament ; rédigé à Sainte-Hélène, a écrit : « Je souhaite que mes cendres reposent au bord de la Seine, au milieu de ce peuple français que j’ai tant aimé… » Lorsque le corps a été exhumé, à Sainte-Hélène, exactement deux mois avant ce 15 décembre, il était, à l’ébahissement de tous, quasiment intact grâce aux bonnes conditions de conservation, cela coupant court, d’ailleurs aux théories « complotistes » que je viens d’évoquer. Enfin, si cette cérémonie, d’une ampleur extraordinaire, a eu lieu le 15 décembre 1840, c’est parce que le gouvernement anglais ayant donné son feu vert en mai de cette année seulement, l’expédition maritime dirigée par le prince de Joinville (fils du roi Louis-Philippe) est partie de Toulon en juillet pour atteindre Sainte-Hélène à l’automne, un incroyable et singulier périple avec des escales aux Canaries, à Madère et au Brésil…

Si votre récit respecte rigoureusement les faits historiques on y rencontre aussi Hugo, Chateaubriand, Balzac, Gautier... Votre côté littéraire reprend toujours le « dessus »... Une façon aussi « d'adoucir » l'Histoire voire le personnage ?

PT : Oui, j’ai souhaité en politologue/historien que je suis, écrire un livre frappé du sceau de la plus stricte vérité, mais étant aussi romancier, j’ai voulu adopter un style vif, romanesque, ne rechignant pas au lyrisme parfois, car cette épopée le mérite. Après, le fait d’y croiser Hugo, Balzac, Gautier et autres grandes figures littéraires, n’est pas une invention. S’ils « adoucissent » l’Histoire, comme vous le dites, ou plutôt lui donnent un tour plus romanesque, ils ont réellement assisté à l’événement et en ont laissé des écrits, comme Victor Hugo dans Choses Vues ou Balzac, dans des lettres à Mme Hanska, où il parle, émerveillé, d’une foule de « quinze-cents mille personnes »… Ce livre est un instantané de l’épopée, mais aussi d’une époque et de ses hauts faits littéraires, musicaux, théâtraux, artistiques au sens large. C’est aussi un hommage à cette belle ville de Paris, qui est un des personnages principaux du livre…

Une première édition de votre ouvrage est parue en 2008 et a été, en 2015, adaptée au théâtre, puis jouée à Paris, en province et au Festival d'Avignon, que retenez-vous de cette expérience ? Voir son texte “prendre vie” ?

P.T : Ce fut une expérience extraordinaire. J’avais déjà eu la chance de voir mes pièces jouées dans de beaux théâtres (dont le Rive Gauche à Paris), mais là, ce fut un vrai travail de troupe - en l’occurrence avec la compagnie Auxenel-Chaplin, pour précision : Annie, la fille d’un certain Charlie Chaplin – pour sa création en province, puis sa tournée sur quelques magnifiques scènes, dont le théâtre André Malraux de Rueil-Malmaison ou Fontainebleau. Le festival d’Avignon, c’est encore autre chose, un peu le Graal pour tout auteur, et l’épopée fut belle. Entendre son texte dit par des comédiens est une volupté sans pareille. L’adaptation du livre à la scène, avec Jacques Auxenel, fut aussi une expérience forte. J’ai deux autres pièces dans les « starting blocks » pour les mois à venir, mais j’aimerais beaucoup que celle-ci, qui a touché des milliers de spectateurs, puisse se remonter un jour…

Que pensez-vous de la polémique autour de la commémoration du bicentenaire de sa mort ? Faut-il célébrer Napoléon ?

P.T : On a d’abord envie de sourire quand on entend en France le mot polémique, ça tourne si vite au babillage de comptoir… C’est le cas avec cette infime minorité, précisons-le, qui « conteste » l’incontestable… Les arguments sont le plus souvent puérils, frappés d’une belle inculture et de cette manie folle de l’anachronisme qui consiste à vouloir réécrire l’histoire à l’aune de la « morale » contemporaine. C’est stupide et dangereux. Vous qui avez lu ce livre, vous savez qu’il n’est en aucun cas une hagiographie de Napoléon, j’y fais nettement la part des choses et, notamment, de la légende noire et de la légende dorée… qui « habillent » tout grand homme, au sens hégélien du mot. Oui, bien sûr qu’il faut commémorer (et non, « célébrer » béatement, vous aurez remarqué la précision sémantique) la mort de Napoléon. C’est d’ailleurs le choix qui a été fait par le président de la République. La France d’aujourd’hui repose toujours à un tel degré sur les incroyables réalisations du 1er empire que vouloir le nier relève de la cécité volontaire. Maintenant, je serai toujours le premier à affronter les sujets qui fâchent. Il n’est pas question de se défiler et il suffit de lire mon livre pour voir que je ne le fais pas. Cela dit, précisions-le, son vrai sujet n’est pas Napoléon, mais un événement majeur de notre histoire qui aura réuni tout un peuple. C’est aussi, j’y tenais beaucoup, un hommage aux oubliés de l’Histoire, car l’Histoire, cette ingrate, ne retient que quelques noms et en oublie beaucoup…

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Propos recueillis par Marie Torres pour www.micmag.net/ Photos Arnie Goodman.
La gloire et la Cendre
L'ultime victoire de Napoléon
Patrick Tudoret
Editions Les Belles Lettres
18,50 euros
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